La Grande Bretagne se lance dans des mesures de rigueur drastiques, dramatiques diront certains, suivant et dépassant l’exemple de ces voisins européens. Pourtant, on s’aperçoit que derrière les projets de rigueur, c’est-à-dire la volonté d’équilibrer enfin les budgets des Etats, se cachent plusieurs solutions/propositions contradictoires : la Grande Bretagne souhaite élever la TVA, l’Allemagne veut la réduire ; on veut faire participer les retraités à l’effort d’austérité en France, ailleurs on propose de les réintégrer sur le marché du travail… Finalement on note qu’il y a une hésitation sur l’objectif final : équilibrer les budgets ou réduire les dépenses publiques ? Et c’est la raison pour laquelle les gouvernants proposent un « mix » de mesures visant tour à tour à réduire les dépenses et à augmenter les impôts. Nul doute qu’avec un objectif confus, les débats politiques iront bon train.
S’il est inévitable d’assainir les finances publiques pour éviter la peur sur les marchés financiers, la fuite des capitaux et l’effet d’éviction (une fuite des capitaux privés vers le secteur public), une augmentation de la fiscalité risque de ralentir durablement l’activité, et cela quelle que soit la vision économique que l’on adopte : une augmentation de la TVA ralentira la croissance pour les keynésiens, tandis qu’elle ralentira les investissements et réduira la compétitivité pour les néo-classiques. Alors quoi ? Tout le monde a raison et on ne peut sortir du piège des dépenses publiques sans abandonner la croissance ?
En réalité, le problème est plus vaste : cette crise actuelle est liée à la crise financière mais couvait depuis longtemps, la crise des subprimes n’a finalement fait que révéler les défaillances structurelles de nos systèmes. Pour soutenir un Etat Providence, il faut toujours plus d’actifs que d’inactifs. A mesure que la part d’actifs diminue proportionnellement aux inactifs et particulièrement au nombre de personnes âgées, le système devient de plus en plus insoutenable.
Alors comment faire ? Est-ce possible d’augmenter le nombre d’actifs pour soutenir l’Etat Providence ?
Oui, c’est possible. Combien d’hommes et de femmes désirent entrer dans nos économies ? Combien d’étrangers sont prêts à travailler dans nos pays ? Pour retrouver un système soutenable, il faut ouvrir nos frontières encore davantage, mais pas n’importe comment.
Souvenons-nous que la croissance est possible s’il existe des individus prêts à travailler pour consommer et des entrepreneurs prêts à produire pour faire du profit. Ainsi, ouvrir les frontières sera la bonne solution à deux conditions : i) redonner l’incitation aux entrants, comme aux personnes déjà présentes d’ailleurs, à travailler et cela passe inévitablement par une baisse des aides sociales qui incitent les hommes et femmes à sortir durablement du marché du travail ; ii) réduire la fiscalité sur les entreprises afin qu’elles élargissent leurs opportunités d’investissement et donc produisent et embauchent davantage. Ce n’est qu’à ces conditions que les défaillances structurelles de nos économies disparaitront.
Finalement, l’enjeu ne porte pas sur la mise en place d’un plan de rigueur immédiat mais sur une révolution idéologique profonde : pour faire survivre nos Etats et donc nos pays, il faut moins d’interaction entre l’Etat et le marché. Le plan de rigueur, s’il doit être mis en place, ne devra pas représenter un quelconque équilibre des finances publiques d’ici dix ou vingt ans pour laisser ensuite la liberté à nos gouvernants d’intervenir à nouveau, mais bel et bien la fin de l’Etat Providence.
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